Au début du mois de mars, j’ai «tiré la plug» sur la course. Après plus de huit ans à user mes souliers dans tous les recoins de la ville et sur plusieurs circuits de la planète, j’en ai eu assez. Oui, moi. Madame Kilomètres, Madame Triathlon, Madame Projets, j’ai frappé un mur. J’en ai trop fait. Le matin où je me suis levée pour courir et que j’ai eu un haut-le-coeur, j’ai garroché mes runnings dans le fond de la garde-robe et j’ai pleuré. Je venais de casser avec la course et j’étais officiellement en peine d’amour.
Qu’est-ce que j’allais faire? Qu’est-ce que j’allais répondre à tous ceux et celles qui me demandent chaque fois qu’ils me croisent: «Et puis Nath? C’est quoi ton prochain défi? Tu t’entraînes pourquoi ces temps-ci?» Après tout, c’était moi la “fille qui court”, celle qui carburait aux projets et qui passait de l’un à l’autre au pas de course. Pourtant, sans que je le vois venir, j’étais devenue celle qui aimait l’idée de courir sans en avoir physiquement envie. J’étais passée d’une relation fougueuse à un amour platonique aux allures de vieilles amitiés usées. J’étais en sérieuse panne de désir.
Comme un ancien amant qu’on a profondément aimé, le souvenir de l’entraînement de course refaisait surface chaque fois que je croisais des coureurs. Un pincement au coeur, un ennui douloureux mais jamais assez fort pour retrouver la motivation de lacer mes souliers. Étrangement, un sentiment de culpabilité venait frapper à mon petit cerveau quand je voyais ma montre de course déchargée et abandonnée sur la tablette. Et la question qui me revenait sans cesse: est-ce que c’est pour toujours? Est-ce qu’on peut rallumer une flamme morte étouffée de l’avoir trop aimée?
C’est hot la vie. Parce que c’est durant cette période que j’ai enfin rencontré le yoga. Après quelques fréquentations timides et plusieurs rendez-vous sans coup de foudre, le déclic s’est produit. Une belle relation toute en douceur s’est installée, basée sur la gentillesse. Le partenariat facile qu’on nous décrit dans les magazines de fille mais qu’on croise rarement. Après presque cinq mois de pratique à raison de cinq à sept séances par semaine, l’harmonie revient doucement entre ma tête, mon coeur et mon corps. Je vis physiquement l’équilibre et j’aime profondément le nouveau sentiment de bien-être qui m’habite.
Et qui s’est réinvité doucement dans ma vie après cinq mois? L’entraînement de course. Mes souliers, les sentiers et moi, on a recommencé à se fréquenter depuis une dizaine de jours. En douceur et à mes conditions, puisque le yoga est là pour rester. C’est comme un genre de trip à trois sans crainte que ça finisse mal pour un des partenaires! Chacun son moment, chacun son objectif différent, avec comme seule conséquence un grand bonheur zen. Mon prochain défi? Pourquoi je m’entraîne ces temps-ci? Pour apprendre à m’aimer chaque jour et me sentir en vie. Je sais qu’une autre folle aventure va finir par se pointer le bout du nez mais je ne suis pas pressée. Après tout, je viens à peine de me réconcilier. Dans six mois? Dans deux ans? C’est pas important, je profite du ici et maintenant.
