À quoi sert un cross country d’école ?
Je fais partie de ces personnes privilégiées qui ont la chance de vivre des moments fantastiques sur une base régulière. Mon lieu de travail est souvent le théâtre d’instants magiques forts en émotions. Le cross country annuel de la fin septembre en est un exemple. Depuis neuf ans, c’est ma journée coup de cœur dans notre calendrier scolaire.
Mais à quoi peut bien servir un cross country d’école ?
Je crois qu’il y a deux réponses à cette question.
Si on veut, on peut y aller avec la réponse très courte : ça sert à rien. En plus on prend du temps qui pourrait être utilisé pour un cours de résolution de problèmes mathématiques par exemple, ou pour une dictée.
Personnellement, je préfère la longue réponse.
Voilà, ce à quoi je crois que ça sert :
– à permettre aux enfants de se connaître un peu plus à chaque entraînement, à entendre leur souffle s’accélérer et leurs cœurs battre. À oser sortir de leur zone de confort et à apprendre que l’effort finit toujours par payer ;
– à mesurer le chemin parcouru entre le moment où ils se fixent un objectif et la journée de l’événement où ils mettent en pratique ce qu’ils ont gagné à la sueur de leur front. On change pendant le processus, on devient meilleur et on fait grandir son sentiment de fierté. Courir ne dépend que de ceux à qui appartiennent les jambes, on ne peut rien déléguer. Donc, au bout de la course, tout le mérite leur revient ;
– à mettre les enfants dans une situation potentielle de défaite. La possibilité de ne pas être capable de terminer est réelle. Si on a une mauvaise expérience, c’est tout ce que c’est. Une mauvaise expérience. Pas une mauvaise vie. Parce que si on a jamais subi de petits échecs pour se pratiquer quand on est jeune, on manque d’outils pour gérer les échecs de grands. Je pense qu’il est important de voir qu’on y survi, qu’il y a des façons de rebondir, et que ce qu’on y apprend peut souvent être plus grand que ce qu’on croit avoir perdu.
Surtout, ça sert à comprendre combien faire de son mieux et donner son 100% est important, toujours. Qu’il faut viser de battre tout d’abord la petite voix dans leur tête qui leur dit qu’ils n’y arriveront peut-être pas. Puis, qu’il faut essayer de se battre eux même et ensuite de battre les autres. Mais que malgré tous les efforts fournis, monter sur le podium n’arrivera qu’à quelques petits coureurs et qu’il y a de fortes chances qu’ils ne gagnent pas la course.
Mes deux fils ont eu la chance de vivre chacun huit courses cross country au cours de leur passage scolaire, de la prématernelle à la 6e année. Maintenant en fin de secondaire et au cégep, ils gardent de précieux souvenirs des entraînements en forêt pendant leur cours d’éducation physique. Ils ont appris avec leurs enseignants à s’entraider, à encourager d’autres collègues de classe et surtout à féliciter avec honnêteté les coureurs qui ont terminé leur course devant comme derrière eux.
Travailler fort. Être inconfortable. Avoir la trouille. Se faire un plan. Arriver à l’accomplir, ou pas. Vivre une déception. Pleurer de fierté et d’effort.
Ces apprentissages importants ne sont encrés profondément que lorsqu’ils sont vécus. Rien de tout ça ne s’apprend dans un livre. Je suis convaincue que plus on y a accès jeune, mieux on peut les mettre en pratique dans toutes les sphères de notre vie : études, emploi, vie sociale et familiale, défis personnels. Si je demandais à un de mes fils s’il se souvient de la dictée de quatrième année pour laquelle il a obtenu 17 sur 20, je sais que la réponse serait « pas du tout ». Par contre, combien il était déçu d’être tombé en glissant dans une flaque de boue, ça il s’en souvient. Combien il était fier d’avoir le record de vitesse de la maternelle à la deuxième année, oui. Combien il a été ému de voir terminer des amis qui avaient eu des coups durs à surmonter, définitivement. Une portion de qui ils sont aujourd’hui est attribuable à leur expérience de course, bien encadrée, dans la sécurité de leur environnement scolaire.
Entendu cette année dans la salle des enseignants quelques minutes avant l’événement :
« Gang, ça y est! Nos élèves ont travaillé fort encore cette année. Souvenez-vous que le câlin que vous faites au dernier coureur doit être aussi important que celui que vous faites au premier. »
« On le sait et on le fait déjà Coach, mais merci de t’assurer qu’on ne l’oublie jamais. »
Et la table était mise pour une autre édition de course extraordinaire, riche en moments émouvants.
À quoi ça sert un cross country un jour d’école ?
À enseigner à tout un groupe d’enfants ce qu’aucun long problème écrit ne saurait leur apprendre : se rapprocher de la meilleure version de leur petite personne. Un pas à la fois. Un battement de cœur à la fois. Un fil d’arrivée à la fois.
J’ai lu votre texte: à quoi ça sert le cross-country : vous avez tellement raison pour avoir suivi mon petit-fils aujourd’hui et sachant toute la discipline et la préparation que celà demande aux jeunes qui se préparent pour courir soit le 1-3-4-ou le 5km..Quelle belle discipline pour ces jeunes,qui vont sûrement devenir des gens responsables et respectueux vis-à-vis les autres.Merci pour cette belle réflexion.Une mamie qui adore ses petits-enfants.
À quoi ça sert un cross-country d’école?
Ça sert à un enfant de participer à une activité physique qu’il n’a jamais faite et de découvrir qu’il a peut-être un talent pour la course.
Ça sert à un prof d’encourager cet enfant et de l’aider à découvrir ce sport et l’aider à se développer.
Merci Jean Amyot! Je suis 40 ans en retard pour te remercier. J’ai pensé à toi toute ma vie et je n’ai jamais oublié le « Wow! Bravo Pascal! » au premier tour du cross-country. J’ai compris ce jour que j’avais un talent et tu m’as permis de le développer. J’ai couru depuis ce jour et je cours encore à 52 ans.
Bel article! Encourageons nos enfants à se découvrir et à se dépasser!
Pascal
En effet, l’impact peut durer toute une vie. Bravo!